Comment les statuts WhatsApp nous renseignent sur la personnalité des individus

Saviez que les statuts live de vos amis peuvent vous donner des informations précieuses sur leur état d’esprit ? Saviez vous que ces murs sont des outils de communication parallèle efficaces mais redoutables ?

Deux scénarios éloquents sur le caractère aliénant des statuts.

Premier scénario :

Abena Owusu, une jeune femme ghanéenne âgée de 26 ans, vient de recevoir un appel de son copain, qui l’annonçait n’avoir plus d’intérêt et voulait stopper leur relation amoureuse qui perdure depuis 4 ans. Abena, étouffe de colère, tout son corps tremble tellement elle est enragée. Après quelques heures de pleurs, elle se rend sur son statut WhatsApp où elle poste des messages apparemment innocents pour un observateur lambda, mais très éloquent pour leur destinataire. Vindicative, ses messages sont lourds de reproche, d’avertissement et de menaces dont la finalité ultime est d’amener son Roméo à renoncer à sa décision ou du moins, à le lui faire regretter et à développer. Quelques jours après cet incident, elle est victime d’un choc cérébral entraînant la paralysie complète du coté gauche de son corps. Plusieurs mois de traitement à l’Hôpital n’ont aucun effet, les médecins ne parviennent pas à identifier exactement la cause de cette paralysie. La famille a ainsi vite fait d’attribuer cela à une attaque mystique d’un(e) jaloux du bonheur et de la beauté de leur fille Abena. La famille ignore qu’Abena traverse une crise émotionnelle depuis sa rupture. Elle ne peut ni ne veut le leur dire également. Son père est un diacre très respecté et influent qui ne rate jamais l’occasion de chanter la chasteté et l’exemplarité de sa fille unique Abena. Ni lui ni aucun autre parent ne se doutent de la vie parallèle dans laquelle cette dernière vivait. Si seulement, ils consultaient les statuts WhatsApp de leur fille, ils auraient longtemps compris qu’il y’avait quelque chose d’anormal qui clochait. Et cela aurait peut-être constitué une piste de résolution du mal intérieur qui rongeait Abena…

Deuxième scénario :

Si le premier scénario est une histoire vraie qui nous a été narrée, la seconde a été personnellement vécue. Notre compagnie avait organisé une soirée de gala pour remercier et dire aurevoir à certains membres sortants du Conseil d’administration. Après le repas et les témoignages, vint l’instant de se défouler. Le DJ de l’occasion joua des rythmes et sonorités locales, mais étant donné que la soirée avait été organisée un vendredi soir, après une longue journée de travail, tous les collègues étaient épuisés et certains retournèrent à leur domicile se reposer. Cependant, une jeune collègue de 27 ans se lança avec énergie sur la piste de danse. Initialement, je crus qu’elle était emportée par la musique, mais je m’aperçu quelques secondes plus tard qu’elle tenait son iPhone en mode selfie, s’autofilmant pendant qu’elle dansait. Elle sollicita même un tiers pour mieux la filmer pendant quelques minutes. Lorsque je l’interrogeais, un peu surpris, elle déclara innocemment que ces vidéos étaient réalisées juste pour alimenter ses statuts WhatsApp, Facebook et Instagram…

Cette déclaration me rappela les propos d’une amie Magalie Laliberté, qui disait en parlant des réseaux sociaux que : « Les jeunes ne vivent plus l’instant présent. Ils documentent le présent. » En effet, les réseaux sociaux sont rapidement devenus des outils aliénant affectant la santé mentale des jeunes, surtout les « digital natives ». Ces derniers n’envisagent point leur vie sans accès à internet, à leur portable, à Internet et tous les contenus qu’on y retrouve. Dans une analyse antérieure, nous présentions déjà l’importance voire l’urgence de parfois de déconnecter, pour respirer, se désintoxiquer, prendre du recul et mieux apprécier la vie sans internet ni réseaux sociaux. Dans celle-ci, nous nous pencherons sur une fonctionnalité spécifique des réseaux sociaux, les statuts, afin de montrer comment ils fournissent de précieuses informations sur l’état psychologique des jeunes et leur potentiel usage pédagogique.

Mais pour faciliter l’analyse, nous avons tenté une catégorisation des profils d’utilisateurs des statuts.

Young women showing a WhatsApp Messenger icon – CC

Les profils d’utilisateurs des statuts.

Image libre de droit

 

Les Annonceurs ou reporters : Cette catégorie regroupe tous ceux qui se servent de leurs statuts comme plateforme publicitaire leur permettant d’annoncer à leurs proches et au monde, les événements auxquels ils sont impliqués ou intéressés. Il est ainsi possible de savoir exactement le lieu et l’activité que réalise ce genre d’individu juste en se rendant sur son statut. Tel des journalistes reporters, ces derniers sont obsédés par le besoin d’informer les autres de tout ce qu’ils font en temps réel. Au niveau psychologique, il s’agit parfois d’un manque de confiance en soi, d’un besoin d’approbation des autres ou tout simplement la satisfaction de leur ego.

 

 

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Les Blagueurs : il s’agit là de personnes passionnées d’humour et baignant régulièrement dans une humeur positive. Sur leurs statuts, la majorité de leurs contenus sont des images ou vidéos hilarantes, le plus souvent collectées sur internet dans des groupes dédiés. Par exemple, il existe des communautés ou groupes Facebook uniquement destinés au partage de contenus humoristiques ou sarcastiques. Il s’agit d’une source d’approvisionnement pour les Blagueurs qui éprouvent du plaisir à diffuser de la bonne humeur ou à arracher un sourire à un proche autour d’eux. Du point de vue psychologique, diffuser le rire pour les Blagueurs a une fonction thérapeutique, un exutoire pour se libérer du stress quotidien du travail, des études, de la famille ou de la vie en général.

 

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Les Cachotiers : Cette catégorie renvoie aux personnes comme Abena Owusu, ceux qui se servent de leurs statuts comme des postes de combat pour mitrailler ceux qui les auraient offensés. Parfois, les attaques sont ciblées et directes lorsque le Cachotier mentionne clairement le nom du destinataire. Mais le plus souvent, elles sont anonymes et seules des proches peuvent cerner les sous-entendus ou non-dits. Au niveau psychologique, les Cachotiers sont parfois des personnes colériques ou timides qui n’arrivent pas toujours à exprimer ouvertement et verbalement leurs émotions. Leurs statuts deviennent ainsi un ring de boxe, où ils peuvent se défouler, cracher leur venin en toute sécurité et confort mental, blotti avec leur portable. De nature renfermés, ils se sentent courageux et puissant lorsqu’ils sont abrités derrière leur écran. Les statuts leur permettent ainsi d’extérioriser leur état psychologique : dépression, stress, fatigue, frustration… Vous ne pourrez saisir leur état émotionnel qu’en visitant leur statut WhatsApp car ils ne vous diront pas ou rarement qu’ils ne vont pas bien.

Les Pros comme l’expression l’indique, désigne ces personnes, parfois matures, qui ont un usage stratégique et consistent de leurs statuts. Il s’agit parfois d’entrepreneurs accomplis ou en devenir qui s’en servent pour éduquer leur audience, marketer leurs produits, motiver leurs followers, réaliser leur branding personnel ou organisationnel etc. Il n’est ainsi pas surprenant de retrouver des profils avec des produits de beauté ou électroniques en vente. Le follower ou regardeur a ainsi une relation directe quoiqu’informelle avec le fournisseur de services. C’est cette pratique qui a motivé WhatsApp à développer une version “business” pour les entreprises afin d’avoir une meilleure relation de proximité entre clients/marchands.

Les Spirituels : il s’agit là de croyants – chrétiens ou musulmans le plus souvent – qui utilisent leurs statuts pour partager des contenus religieux dérivés de leur expérience personnelle ou tiré de livres ou personnalités religieuses. Il est par exemple courant de retrouver des versets bibliques ou coraniques, des mots d’encourages chrétiens… Evidemment, il est peu recommandable de se fier à ces statuts à caractère religieux pour mesurer la maturité spirituelle d’un individu.

Voilà ainsi présentés les 5 profils d’utilisateurs des statuts sur les réseaux sociaux. Evidemment il ne s’agit point de catégories closes et fixes, mais juste des traits dominants. On peut ainsi retrouver un Cachotier partager des contenus spirituels, pour se remonter le moral ou attaquer une cible invisible. On peut également avoir un Annonceur pro, qui est consistent et stratégique dans ses usages. Le plus important n’est point cette catégorisation, mais le fait qu’elle permette de ressortir et d’apprécier les dynamiques en cours dans les usages des réseaux sociaux. Les professionnels de la santé, surtout mentale, trouveront en cela un matériau supplémentaire pour améliorer le diagnostic de leurs patients. Et parfois, cela peut sauver des vies, surtout lorsque la victime de trouble psychologique n’extériorise point véritablement son état émotionnel ou psychologique.

Cependant, la communauté éducative est-elle consciente des immenses potentialités contenues dans les espaces d’apprentissage informel comme les statuts, et exploite-t-elle l’omniprésence des technologies mobiles afin d’encourager de nouvelles percées pour relier entre eux les environnements scolaires, post-scolaires et familiaux ? Telle est la question principale à laquelle la seconde partie de notre analyse tentera d’apporter un éclairage.

9 thoughts on “Comment les statuts WhatsApp nous renseignent sur la personnalité des individus”

  1. Bon article. Je suis moi-même en train de préparer un article sur le sujet car c’est un domaine d’étude vraiment très intéressant

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  2. Effectivement ! Les statuts WhatsApp ont vraiment changé les modes de communication, surtout la conversation.
    On passe de plus des conversations directes vers des conversations indirectes et transparentes. A mon avis, cela nous désocialise davantage. Les gens ne prennent même plus la peine de s’écrire mais poste seulement sur leur statut et s’imaginent que tu dois être au courant de ce qui leur arrive

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  3. Les cachotiers auraient dû s’appeler “les soldats” ou “Les combattants” ou “Les snipers”…
    Article intéressant 😀

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  4. Bonjour Mawulolo ! Merci pour la suggestion. “Les Snipers” me séduit davantage, je pense que je vais l’adopter. Merci

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  5. Bonjour Christian Elongue, ton article a attiré mon attention surtout parce que je suis en train de préparer un article aussi sur les statuts WhatsApp. C’est un phénomène que j’observe il y a quelque temps. Merci de m’éclairer davantage sur ce sujet. Bravo! J’attends la suite de ton analyse. Je suis étudiant en communication et je suis très intéressé aux reseaux sociaux.

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  6. Bonsoir Justin,
    Ravi de savoir que mon article a suscité ton intérêt.
    En effet, le phénomène de communication parallèle au travers des Statuts va continuer à affecter les dynamiques relationnelles entre les individus. Prière de t’abonner à la newsletter pour recevoir une alerte lorsque la prochaine analyse sera publiée.
    Prière également de partager ici un lien vers ton article. Je serai ravi de le découvrir et lire.
    Cdlt,

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  7. Je trouve cet article très intéressant. Merci pour ces catégories de profils d’utilisateur de wathsapp. Je vais passer à la pratique en tentant d’analyser les statuts que je reçois !

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    • Bonsoir Adrienne,
      J’espère tu as pu analyser certains des profils comme indiqué.
      Quels sont ceux que tu as le plus remarqué? Dans quelle catégorie te range tu toi même? Et moi donc? 🙂

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